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Fouilles archéologiques
En remontant la Rivière aux Brochets
C'est dans la nature des êtres humains de vouloir connaître le passé, et même d'en savoir le plus possible sur le futur. La curiosité et la soif de savoir sont des vertus qui ne se limitent pas aux jeunes ou aux moins jeunes. C'est de l'histoire du passé de Brome-Missisquoi qu'il est question dans ce texte, qui s'adresse à tout le monde. Il s'agit d'une histoire particulière qui ne puise pas ses informations dans les documents écrits. Elle nous permettra de remonter dans le temps, de retourner à une époque bien avant l'arrivée des premiers Européens au XVI ième siècle. En effet, depuis 1990, des interventions archéologiques ont été menées sur le territoire de la Municipalité régionale de comté (MRC) de Brome- Missisquoi. Une entente conclue entre la MRC, le ministère de la Culture et des Communications et l'Université de Montréal a permis de réaliser un programme d'inventaire et de fouilles jusqu'en 1994.
Une histoire pas comme les autres.
Le lecteur est donc invité à remonter dans le temps la rivière aux Brochets pour obtenir une vision toute spéciale des aventures humaines, dont certaines précèdent même la naissance du Christ. Ainsi, les Amérindiens occupaient la région au même moment où les Égyptiens construisaient leurs pyramides. Plus tard, quand les Romains bâtissaient leur empire, les groupes de Brome-Missisquoi faisaient des échanges avec d'autres groupes situés aussi loin que les Grands Lacs. Cette histoire se trouve enfouie dans le sol, oubliée depuis des générations. Pour la raconter, il faut fouiller les archives de la terre. C'est le travail des archéologues. Ces derniers essaient de reconstruire les événements qui ne sont pas documentés car ils traitent d'une époque où les populations humaines ne connaissaient pas l'écriture. On ne remontera pas le temps de quelques siècles seulement, mais bien de plusieurs milliers d'années. La période qui précède l'écriture, la préhistoire, s'étale sur plusieurs millénaires, et il faudra imaginer un paysage très différent de celui d'aujourd'hui. Il faut retenir ici que les archéologues traitent le temps comme un élément essentiel dans leur tentative de reconstruire 1'histoire d'une région. Après une brève présentation de l'archéologie et de ses méthodes, le milieu dans lequel les aventures humaines se sont déroulées retiendra notre attention. Les grands événements qui ont marqué l'histoire amérindienne de la région seront présentés. En remontant la rivière aux Brochets, et les autres rivières de la MRC, le lecteur, à chaque coup de pagaie, sera transporté dans le temps pour découvrir des cultures, des campements, des objets, et des comportements variés et différents. En espérant que cette lecture se transformera en voyage de découverte...
L'archéologie et ses méthodes.
Il est vrai que l'archéologie est une jeune discipline au Québec. Avant 1960, on pouvait compter sur les doigts de la main le nombre d'archéologues québécois. C'est au cours des deux décennies suivantes que des archéologues seront formés dans les universités québécoises. C'est le début d'une archéologie scientifique moderne. Actuellement, une centaine d'archéologues oeuvrent au Québec, et les recherches sont nombreuses à l'intérieur d'un cadre rigoureux. En effet, il ne suffit pas d'aimer les vieilles choses et le camping, ou d'avoir le goût de creuser la terre pour être archéologue. Ce dernier doit faire une demande de permis au ministère de la Culture et des Communications et obtenir la permission du propriétaire avant d'amorcer ses travaux. Il existe des lois règlent les activités archéologiques, et leur respect, par tout le monde, permettra la protection de ce patrimoine national. L'archéologue est comme un détective qui s'occupe du passé. Il trouve des indices et il se doit de les interroger pour extraire un message. Il n'a pas à trouver un coupable mais, comme le détective, il doit essayer de reconstituer la scène, non pas celle du crime, mais celle du lieu où vivait un groupe humain. L'archéologue cherche ses indices sur des sites. Qu'est-ce qu'un site? Il s'agit d'un lieu où des traces matérielles ont été laissées par des humains. Il peut s'agir d'anciens bâtiments historiques, d'objets fabriqués par des individus (artefacts) tels que des pointes de projectile, des couteaux et des haches, ainsi que de déchets liés à une consommation humaine (écofacts) tels que des ossements ou des coquillages. On peut aussi imaginer un site comme étant un livre, et la fouille a alors pour but d'en lire les pages.
Comment trouve-t-on des sites archéologiques
L'énigme qui entoure cette interrogation repose sur le fait que les sites préhistoriques ne sont pas visibles en surface. L'archéologue est alors perçu comme un magicien. Sauf dans le cas de champs labourés où les objets ont été déplacés vers la surface, il faut creuser le sol pour découvrir les témoins du passé. La vraie question est donc : pourquoi creuser ici et pas là-bas?L'archéologue qui trouve un site archéologique a souvent répondu à une hypothèse basée sur la façon de vivre et de s'établir des groupes amérindiens de la période historique. Ces populations nomades vivaient le long des cours d'eau durant la saison estivale.
Ce choix s'explique par leur volonté d'être à proximité de l'eau potable, d'avoir accès aux ressources aquatiques et de pouvoir se déplacer en canot. Les terrains bien drainés le long des cours d'eau sont ainsi favorisés par les archéologues lors de leur recherche de sites amérindiens. Il faut aussi mentionner que, pour trouver un site, l'archéologue fera des centaines de sondages dont la majorité restera infructueuse. L'archéologue ne trouve pas à tout coup. Il faut inévitablement de la patience et de la persévérance pour pratiquer cette profession. L'objectif de l'archéologue est de reconstituer le mode de vie des sociétés. Pour y arriver, il se doit de préciser le moment de l'occupation, d'identifier le groupe et de comprendre les comportements ayant permis l'adaptation du groupe au milieu. Les principales questions de l'archéologie se résument à : Quand? Qui? Comment? et Pourquoi? Nous essaierons de répondre à ces questions en esquissant l'histoire amérindienne de Brome-Missisquoi.
Le Québec est bien connu pour ses hivers rigoureux. Rappelons que toute la province a déjà été recouverte d'une épaisse couche de glace. Cet énorme glacier, qui couvrait aussi une grande partie du Canada, a empêché toute présence humaine jusqu'à son retrait, amorcé il y a environ 12 000 ans avant aujourd'hui. Les spécialistes des sciences de la Terre ont retracé les différentes étapes de la déglaciation. Ainsi, quand le front du glacier se trouvait au nord de Montréal, toutes les basses terres au sud étaient envahies par les eaux de fonte. Cet épisode se nomme "Mer de Champlain". Cette mer appelée "Mer de Champlain" couvrira alors toutes les basses terres du fleuve Saint-Laurent et la région du lac Champlain. Elle se transformera en un lac d'eau douce vers l'an 9 800 avant aujourd'hui.
On peut donc dire que le peuplement de Brome-Missisquoi a été empêché d'abord par le glacier et ensuite par les inondations. C'est vers 8 000 ans avant aujourd'hui que le milieu connaît un équilibre. L'assèchement des terres permet alors le peuplement végétal, mais la forêt n'est pas identique à celle qui existe actuellement. Il s'agissait d'une sapinière adaptée à un climat plus froid que celui qui prévaut de nos jours. Il faudra attendre un réchauffement climatique pour enregistrer le développement d'une forêt dominée par les espèces d'arbres peuplant une érablière. Cette transformation est devenue une réalité vers l'an 6 000 avant aujourd'hui, ce qui permet aux archéologues d'imaginer un paysage semblable à celui décrit par les premiers colons.
L'évolution du milieu est une histoire dynamique : un glacier d'une épaisseur de mille mètres, une mer et ses baleines qui nageaient au-dessus de la région, une forêt de conifères, qui se développe après l'implantation d'une toundra avant d'être transformée en sapinière puis en érablière, une faune dominée d'abord par le caribou puis par le cerf de Virginie, le castor et les poissons. Après tous ces changements, le territoire était devenu habitable et intéressant pour les groupes humains qui vivaient déjà au sud depuis plus de 10000 ans avant aujourd'hui. À quand remonte le peuplement de notre territoire?
Les premiers occupants
La préhistoire du Québec, tout comme celle du nord-est de l'Amérique du Nord, se divise en trois grandes périodes: le Paléoindien, l'Archaïque et le Sylvicole. La période paléoindienne couvre quatre millénaires, entre 12 000 et 8 000 ans avant aujourd'hui. Les groupes de cette période n'ont pas foulé le sol de la région de Brome-Missisquoi. Ils ont cependant occupé des sites situés à proximité de la frontière du Québec. Il n'est donc pas impossible que des incursions aient eu lieu à cette époque lointaine. L'absence de ces chasseurs, qui taillaient des pointes à cannelures afin d'amincir la base et faciliter l'emmanchement, ne se limite pas à Brome-Missisquoi. Elle vaut aussi pour tout le Québec. Après l'an 10000 avant aujourd'hui, une nouvelle migration de groupes dont la culture est différente des premiers groupes paléoindiens va se produire dans la vallée du Saint-Laurent, mais curieusement la plupart des sites se trouvent à l'est de la ville de Québec. Des concentrations de sites ont été trouvées dans la région de Rimouski et sur la rive nord de la Gaspésie.
Les recherches archéologiques menées sur le territoire n'ont pas permis de documenter cette période. Elles ont cependant permis la découverte de dix-huit sites amérindiens préhistoriques et d'un site de la période historique (figure 4). Selon nos résultats, ce n'est pas durant la période paléoindienne que s'est déroulé le peuplement de la région.
Les premiers occupants du territoire appartiennent à la période de l'Archaïque (10000 à 3000 ans avant aujourd'hui). Durant ce long épisode, les groupes s'adaptent à un milieu plus stable et le mode de vie est basé sur l'exploitation de toutes les ressources du milieu. Les populations sont encore très nomades, ce qui explique en partie la mise en place d'un vaste réseau d'échanges.
C'est sur le site Gasser, ainsi nommé en l'honneur de son propriétaire, que les plus vieux indices d'une présence humaine ont été trouvés. Situé sur une terrasse le long de la rivière aux Brochets, le site occupe une position stratégique au pied des premiers rapides de la rivière. Les Amérindiens pouvaient y pêcher et, comme la rivière se jette dans la baie Missisquoi à cinq kilomètres de là, ils pouvaient aussi exploiter un vaste territoire à l'aide de leurs canots d'écorce. Du charbon de bois trouvé dans un foyer composé de plusieurs pierres rougies par le feu a été daté à l'aide de la méthode du carbone 14. La date obtenue fait remonter l'âge du site à près de 5 000 ans avant aujourd'hui. En plus de cette preuve basée sur une méthode nucléaire, des pointes de projectile ont aussi été identifiées à cette période.C'est en comparant ces pointes avec celles d'autres régions que les archéologues parviennent à proposer un tel âge. Cette approche comparative porte aussi le nom de typologie. On fait des types en se fiant à la forme et à la dimension des pointes. En outre, une des pointes a été taillée dans une pierre qui ne se trouve pas dans la région: il s'agit du chef Onondaga. On connaît même la source de cette matière que l'on trouve dans la région des Grands Lacs, à une distance qui s'élève à plus de 500 km. Ce chef Onondaga est facile à reconnaître. Il est gris avec des nuages de teintes variant du blanc au brun en passant par le bleu. Les outils de pierre étant d'une importance capitale pour la survie des groupes, la matière première était un bien d'échange commun entre les différents groupes.
On peut affirmer que le plus ancien groupe à avoir occupé la vallée de la rivière aux Brochets était bien adapté aux ressources du milieu. En plus de pêcher dans les eaux de la rivière aux Brochets et du lac Champlain, il connaissait les sources de pierres aptes à confectionner leurs outils nécessaires à leur survie. Ces sources se trouvent dans les basses terres du lac Champlain. De plus, ce groupe entretenait des contacts avec d'autres groupes, leur permettant de participer à un vaste réseau où circulaient des objets, des individus, de l'information et des modes. Peu de temps après, toujours pendant la période de l'Archaïque, de nouveaux groupes font leur apparition. À la confluence de deux branches de la rivière Yamaska, sur le site Husler, nommé ainsi en l'honneur du propriétaire, des charbons de bois trouvés dans un foyer de pierres rougies et éclatées par le feu ont été datés avec le carbone 14 à près de 4 000 ans avant aujourd'hui.
Ce groupe parcourait de grands espaces car la matière qu'il taillait provenait d'une source située sur la rive est du lac Champlain. Ce groupe taillait aussi une piene pouvant provenir des collines Montérégiennes et qui est difficile à identifier avec précision. Il s'agit peut-être d'un "siltstone" ou d'une "cornéenne". Pour le confirmer, il faut l'aide des géologues. C'est dans cette matière que les tailleurs confectionnent la majorité de leurs outils. On identifie ce nouveau groupe d'après la taille de ces nouveaux types d'outils. Ces tailleurs de siltstone ou de cornéenne pratiquent le même mode de vie basé sur l'exploitation des ressources. En plus d'occuper la rivière Yamaska, ces groupes sont présents sur plusieurs sites de la vallée de la rivière aux Brochets. ils y pêchaient le doré et chassaient le castor et d'autres gros mammifères. C'est encore sur le site Gasser que l'on trouve le plus d'indices de leur passage saisonnier. D'autres dates au carbone 14 indiquent une présence jusqu'à la fin de la période Archaïque, vers l'an 3 000 avant aujourd'hui.
Une nouvelle période, un nouvel élément technologique
À la fin de l'Archaïque, un nouvel élément technologique fait son apparition, le récipient en terre cuite. La poterie devient ainsi le facteur dominant pour créer une période dite Sylvicole (1 000 avant J.-C. à 1534 après J.-C.). Les contenants d'argile ne seront pas très populaires au début. L'étude de l'évolution de la poterie servira aux archéologues pour dater les modes durant le Sylvicole (figure 5). Des analyses sur la composition chimique des argiles utilisées pour façonner les vases indiquent même que ces plus vieux pots étaient des importations au même titre que les pointes et les grattoirs dont la matière origine des Grands Lacs. Durant près de 600 ans, les groupes de Brome-Missisquoi participeront à un vaste réseau d'échanges avec des groupes de l'Ouest. Les données actuelles ne sont pas suffisantes pour évaluer le degré de participation à ce réseau mais il est possible de conclure en l'importance des contacts commerciaux à cette époque.
Ce réseau s'étend de la rivière aux Brochets à la rivière Yamaska. Les indices sont peu nombreux mais, sur le site Husler, une concentration de grattoirs laisse croire à une aire d'activités consacrée au traitement des peaux. La découverte de plusieurs éléments osseux de castor vient appuyer cette idée. Ce mammifère se trouve d'ailleurs dans tous les sites fouillés, ce qui confirme son importance aux yeux des Amérindiens.
Quelques siècles avant la naissance du Christ, un autre changement se produit. La décoration de la poterie se généralise,et le nombre de vases augmente sur les sites, ce qui permet de supposer qu'il y eut une réduction de la mobilité. On remarque ces tendances sur les nombreux sites de cette époque dans notre région. Les sites se trouvent près des berges, et la pêche semble devenir l'activité principale durant l'été.
C'est durant cette période, qui s'échelonne entre l'an 400 avant J.-C. et 500 après J.-C., que la population semble augmenter et que les sites sont fréquents. Durant la période qui suit, d'autres changements se produisent. Le plus important est la réduction encore plus forte de la mobilité. Certains sites regroupent plus d'individus pour un séjour prolongé. C'est le début d'un mode de vie sédentaire qui peut s'étendre de la fin du printemps au milieu de l'automne. Les petits campements d'été sont donc plus rares et nous le constatons dans notre région. Nous n'avons pas trouvé l'un des gros sites, mais un vase typique de cette période a été trouvé sur un site de la vallée de la rivière Missisquoi. La décoration à la cordelette et les ponctuations sont des modes décoratives populaires à cette époque.
De plus, la forte dimension du vase suppose son utilisation comme vase d'entreposage, une autre caractéristique qui annonce d'autres bouleversements. Ces bouleversements se traduisent par l'adoption de l'agriculture, de la vie villageoise et d'un mode de vie plus sédentaire à partir de l'an 1000 de notre ère. Ces changements ne s'appliquent pas à toutes les populations et à toutes les régions. Ces changements étaient radicaux et plusieurs groupes ont résisté à ces nouveaux comportements.
La dizaine de sites ayant révélé des occupations de cette dernière période avant l'arrivée des Européens témoigne d'une continuité dans le mode de vie. En effet, aucun village n'a été trouvé et les indices démontrant la pratique de l'agriculture ont échappé à nos recherches. Toutefois, le site Bilodeau, du nom du propriétaire, se démarque des autres. Situé en face du site Gasser près des premiers rapides de la rivière aux Brochets, le site a été choisi par un groupe venant d'ailleurs, probablement de la vallée de la rivière Richelieu. Ce groupe, dont la décoration des vases en terre cuite est identifiée à la tradition iroquoienne du Saint-Laurent, a construit une cabane longue de sept mètres et large de quatre mètres. Cette habitation pouvait abriter facilement deux familles venues pêcher le doré qui frayait au pied des rapides à la fin du printemps. Le groupe a aussi laissé près de la cabane un petit dépotoir d'ossements. Ces restes de repas indiquent une alimentation variée même si elle était dominée par le doré.
Ces Iroquoiens ont consommé de la viande rouge de castor, d'ours noir et de cerf de Virginie. Ces prises étaient rendues possibles par une durée de séjour pouvant s'étirer sur plusieurs semaines. Pour appuyer cette proposition, on peut ajouter la fabrication sur place de plusieurs vases. En effet, les analyses spécialisées indiquent nettement qu'une argile locale, prélevée à moins de deux kilomètres du site Bilodeau, était utilisée pour modeler ces vases, typiques des groupes iroquoiens de la vallée du Saint-Laurent.
Sur l'identité ethnique des groupes ayant pu exploiter les ressources de la région de Brome-Missisquoi, il faut être très prudent. Les documents historiques indiquent clairement la présence de groupes algonquiens à l'embouchure de la rivière Missisquoi, probablement des Abénaquis, ainsi que l'utilisation des grands axes de circulation par les Mohawks pour mener la guerre aux Français le long du Saint-Laurent. il faut se rappeler la bataille entre Samuel de Champlain et les "Iroquois" au lac Champlain en 1609. En outre, les données archéologiques permettent d'avancer l'hypothèse d'une présence des Iroquoiens du Saint-Laurent dans la région. Le territoire de Brome-Missisquoi a fort bien pu être occupé ou exploité par plusieurs groupes ethniques pendant les quelques siècles qui ont précédé l'arrivée des Européens.
Ces groupes, peu importe leur origine, utilisent toujours les pierres disponibles dans la région pour tailler leurs pointes de projectile. Les artisans préhistoriques ne se limitaient pas seulement à la taille. ils polissaient aussi la pierre pour la transformer en hache ou en ciseau à bois. Ces outils, souvent très lourds, étaient aménagés à partir de roches dures ramassées sur le bord des cours d'eau. Les outils polis sont présents depuis l' Archaïque dans les coffres à outils des populations préhistoriques.
Le Sylvicole se termine avec l'arrivée des premiers Européens. Aucun site de la région n'offre des indices de contact entre ces deux mondes. Les eaux de la rivière aux Brochets continueront d'être troublées pendant quelques siècles par la cadence des pagaies en bois, mais plus tard la vapeur puis l'essence seront utilisées plus fréquemment pour propulser les embarcations qui fendront le courant et remonteront les rivières jusqu'à notre époque.
En remontant le temps... c'est à la recherche de nos racines que nous nous attardons. Cette recherche peut enrichir nos connaissances et inciter au respect de notre patrimoine, visible et invisible.
En remontant la rivière aux Brochets, ce sont 5 000 ans d'une histoire écrite dans les archives de la terre qui sont maintenant disponibles pour nourrir notre mémoire collective. De toutes les époques mentionnées, l'ouverture des groupes au commerce avec des groupes de l'extérieur est une constante. On peut apprendre de cette histoire que le partage est un atout pour tout groupe qui veut s'adapter à son milieu, aussi bien naturel que social.
En remontant les rivières, ces autoroutes du passé, c'est notre mémoire qui s'enrichit. Avant le début des travaux archéologiques dans la MRC de Brome-Missisquoi en 1990, qui pouvait savoir qu'une population exploitait la région il y a 5 000 ans et que le territoire serait toujours occupé par la suite? Qui aurait pu dire que des groupes locaux s'approvisionnaient aux sources de pierres du lac Champlain pour tailler leurs outils, que des échanges se produisaient régulièrement à une grande échelle, que la pêche était aussi importante que la chasse durant l'été et que des Iroquoiens du Saint-Laurent occupaient le territoire avant de disparaître comme groupe avant l'arrivée de Samuel de Champlain, le fondateur de Québec?
Toutes ces informations étaient inconnues avant le travail patient et persévérant des archéologues. Ces chercheurs creusent le sol pour déterrer des histoires vécues par des sociétés disparues. L 'histoire amérindienne de Brome-Missisquoi s'ajoute à toutes les autres pour confirmer l'ancienneté et l'originalité des groupes ayant exploité cette région.
Les informations archéologiques présenté dans ces pages ont été obtenues lors d'une recherche réalisée dans le cadre d'une entente entre le ministère de la Culture et des Communications du Québec, la Municipalité régionale de comté de Brome-Missisquoi et l'Université de Montréal.Auteur : Claude Chapdelaire, Université de Montréal.Traduction anglaise : Chantal Pelletier, MRC de Brome Missisquoi.Avec la collaboration de la Société Recherches amérindiennes du Québec, Montréal.
Quelques livres à lire pour en savoir plus...
Balac, A.-M., C. Chapdelaine, N. Clermont et F. Duguay, 1995 : Archéologies québécoises. Paléo-Québec 23, Recherches amérindiennes au Québec, Montréal.
Chapdelaine, C., 1989 : Le site Mandeville à Tracy, variabilité des Iroquoiens du Saint-Laurent. Recherches amérindiennes au Québec, Montréal.
Chapdelaine, C., éd., 1978 : Images de la préhistoire du Québec. Recherches amérindiennes au Québec, vol. VI, nos 1-2, Montréal.
Chapdelaine, C., J. Blais. J.-M. Forget et D. StArnaud, 1996: En remontant la rivière aux Brochets, Cinq mille ans d'histoire amérindienne dans BromeMissisquoi. Paléo-Québec 25, Recherches amérindiennes au Québec, Montréal.
Clermont, N., et C. Chapdelaine, 1982: Fointe-duBuisson 4 : Quarante siècles d'archives oubliées. Recherches amérindiennes au Québec, Montréal. Haviland, W.A., et M. W. Power, 1981 : The Original Vermonters : Native Inhabitants, Fast and Fresent. University Press of New England, Hanover.
Wright, J. V., 1979 : Québec Prehistory. National Museum of Canada, Ottawa. Wright, J. V., 1980 : La préhistoire du Québec. Éditions Fides/Musée canadien des civilisations, Montréal.